Documents  Wiet, Gaston | enregistrements trouvés : 3

"Né dans un village de Moyenne-Egypte en 1889, Taha Hussein, devenu aveugle à l'âge de trois ans, fit ses études à la célèbre Université religieuse d'El Azhar, puis à la jeune Université égyptienne, et il les compléta à la Sorbonne.
Professeur de littérature arabe à la faculté des Lettres du Caire, doyen de cette faculté, premier recteur de l'Université d'Alexandrie, créée par lui en 1942, contrôleur général de la culture, conseiller technique et sous-secrétaire d'État au ministère de l'Instruction publique, telle est; la carrière officielle de Taha Hussein.
Mais il est avant tout un écrivain ; et dans son oeuvre considérable rien n'est indifférent : ouvrage de critique, essais, romans, articles politiques lui ont permis de dire, sans ménager personne, ce qui lui paraissait être la vérité et le devoir. Il a rénové la littérature arabe, où il a introduit le libre jugement, la discipline raisonnable ; mais en même temps, parce que c'est un prodigieux artiste, il a renouvelé la *forme grâce à une langue qui lui appartient en propre, simple, volontairement dépouillée, harmonieuse et expressive autant qu'il se peut; il a rendu à une littérature, que menaçait le verbalisme, la sensibilité et la vie.
C'est sans doute parce qu'il joint à sa très rare culture, orientale et européenne, une indomptable liberté d'esprit, que Taha Hussein n'a jamais reculé devant les conséquences de sa parole et de ses actes: ils lui valurent souvent des heures difficiles, mais font de sa vie tout entière le plus bel exemple d'exigence et de désintéressement au service de la pensée et de cet immense prestige qui rayonne du Maroc jusqu'aux Indes. Nul ne conteste plus qu'il soit le plus grand écrivain arabe contemporain; il est aussi le maître à qui tous les jeunes (et pas seulement les apprentis savants ou écrivains), demandent aide et conseils.
Faut-il ajouter qu'il prit nettement parti, pendant la guerre, pour la cause du droit et par tous ses moyens contribua à la victoire des Nations unies ? Pour la France en particulier, il manifesta la tendresse la plus active et souvent la plus efficace, alors que d'autres désespéraient d'elle."